LOT 006

1936 - 1972
Canadien

Still Life with Fruit and Blue Teapot
huile sur toile, 1957
signé
13 1/4 x 16 1/4 po, 33.7 x 41.3 cm

Estimation : 15 000 $ - 20 000 $ CAD

Exposition à : Heffel Toronto – 13 avenue Hazelton

PROVENANCE
Un cadeau de l’artiste à sa belle-sœur Brigitte Pflug, Munich
Collection privée, Toronto


Née à Berlin en 1936, Christiane Pflug est la fille de Regine Schütt, infirmière de la Croix-Rouge, créatrice de mode et militante antifasciste issue d’une famille aisée de la classe moyenne. En raison des bouleversements de la guerre et pour sa propre protection, Pflug a passé de longues périodes de son enfance à l’extérieur de Berlin, dans sa famille, chez des amis de la famille ou encore dans des familles d’accueil en Autriche et en Allemagne, jusqu’à ce qu’elle retrouve sa mère en 1949. Elle étudie le design de mode en 1953 à l’École Baziot de Paris, où elle rencontre son mari, Michael Pflug. Alors étudiant en médecine, il l’initie au style, à la technique et à la théorie, et l’encourage à poursuivre son intérêt pour l’art qu’il a étudié.

Autodidacte, Pflug consacre l’ensemble de sa carrière à peindre les scènes de la vie domestique. Elle s’intéresse principale aux paysages, aux intérieurs et aux natures mortes, et aux portraits à l’occasion. La vue à l’extérieur de chez elle est également un thème courant et influence d’ailleurs le choix des maisons qu’elle habite. Après leur mariage en 1956, Pflug et son mari passent deux ans à Tunis où naissent leurs deux filles et où son travail commence à s’épanouir. Elle y étudie les œuvres de Francisco Goya et de Pablo Picasso. Still Life with Fruit and Blue Teapot est un bel exemplaire des débuts de sa carrière professionnelle.

Ici, Pflug a réduit sa composition à deux éléments : une théière bleu outremer ornée d’un simple motif floral et un citron. Nous savons que les objets provenant de Tunis ont dû être des talismans importants des expériences qu’elle y a vécues, puisqu’ils apparaissent dans des tableaux ultérieurs peints au Canada. Les sujets et les compositions de cette période sont simples et comportent des titres descriptifs, mais ils dégagent une intensité psychologique par des variations de tons et une palette sourde. La composition de Still Life with Fruit and Blue Teapot, qui suit une seule ligne de perspective, rappelle les œuvres du peintre de natures mortes Giorgio Morandi en raison de l’attention sans complaisance que Pflug porte à un sujet simple témoignant du quotidien. En disposant les objets au bord d’une même ligne d’horizon, elle comprime l’espace qu’ils occupent. L’œuvre préfigure les lignes d’horizon qui seront au cœur des paysages ultérieurs de l’artiste.

Le choix du sujet est révélateur : les deux objets font allusion à l’influence de la culture et du paysage tunisiens à l’extérieur de sa maison. Le bleu dense et son motif floral font référence aux couleurs vives et aux textiles et arts décoratifs tunisiens, tandis que le citron est un fruit cultivé dans sa région d’adoption. Cependant, la palette atténuée de Pflug crée une intensité psychologique. La scène raccourcie par la profondeur de champ réduite crée une compression légèrement claustrophobique dans cet espace domestique. La qualité de la lumière dans Still Life with Fruit and Blue Teapot est incertaine : le citron et la théière projettent deux ombres et la lumière semble provenir de directions différentes.

Dans cette nature morte sereine, la théière dégage une certaine fragilité, avec son anse à la courbe délicate et ses bords précis, tandis que son motif ornemental semble marqué par une tache brun foncé de rouille ou de peinture écaillée qui occulte le motif floral. Le tableau est le fruit d’une observation attentive. Plus tard, Pflug se fera connaître pour ses œuvres souvent réalisées sur une période de quelques mois, avec plusieurs saisons représentées simultanément dans une seule scène. On l’a qualifiée de « réaliste magique » en raison de sa puissante capacité à conférer à ces scènes une signification d’un autre monde, en partie grâce à leur ambiguïté temporelle.

Après un bref retour à Munich, la famille s’installe à Toronto en 1959. De 1962 à 1967, Pflug est prise en charge par la prestigieuse galerie Isaacs, qui représente également les artistes Michael Snow, Joyce Wieland et William Kurelek. Elle connaît un succès commercial précoce, en plus d’être l’une des rares femmes à occuper à l’époque un poste d’enseignante à l’Ontario College of Art and Design. Les dessins et peintures de Pflug ont été mis en valeur lors de trois expositions individuelles – à la Winnipeg Art Gallery (1966), à la Justina M. Barnicke Gallery de Hart House (1969) et à la Sarnia Public Library and Art Gallery (1971) – ce qui témoigne de son influence et de son importance. Ses œuvres font partie des collections du Musée des beaux-arts du Canada et du Musée des beaux-arts de l’Ontario. Pflug est décédée en 1972 à l’âge de 35 ans.

Nous remercions Lisa Baldissera qui a rédigé l’essai ci-dessus. Depuis 1999, Lisa Baldissera a été conservatrice dans des musées de l’ouest du Canada et est actuellement directrice de Griffin Art Projects à North Vancouver, en Colombie-Britannique. Elle a obtenu son doctorat à Goldsmiths, Université de Londres, en 2021.


Estimation : 15 000 $ - 20 000 $ CAD

Tous les prix affichés sont en dollars canadiens


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